da eddiesachs » 03/03/2010, 9:27
ecco qui l'articolo del 1960 di Roger Labric, dedicato a Robert Benoist:
ROBERT BENOIST BAT UN RECORD EN TERMINANT EN MARCHE ARRIÈRE
Robert Benoist fut, avec Louis Chiron, au tout premier plan des coureurs français de l'entre-deux guerres. Tous deux conquirent à tour de rôle le championnat du monde des conducteurs : Benoist en 1927, Chiron en 1936.
Robert Benoist mena une vie très mouvementée mais il était dans son caractère de témoigner toujours d'un calme impassible dans les pires circonstances.
Robert Benoist fut mon ami d'enfance; nous nous connûmes dans un lycée de Seine-et-Oise,
puis nous débutâmes ensemble dans le sport cycliste amateur, avant de nous retrouver en escadrille, sur le front de 1914-18.
J'appréciais ce camarade resté toujours le même, aussi simple, aussi fidèle en dépit d'une grande popularité de champion conquise à l'époque du cyclecar comme chef de file de l' équipe Salmson.
Robert Benoist allait confirmer sa classe exceptionnelle avec les fameuses Delage conçues par l'ingénieur Lory à l'usine de Courbevoie.
En 1927 Robert Benoist s'adjugeait: le Grand Prix de l'A.C.F. à Montlhéry; le Grand Prix d'Espagne à Saint-Sébastien; le Grand Prix d'Europe en Italie et le Grand Prix de R.A.C. en Angleterre.
Lui et sa Delage étaient alors sacrés champions du monde, mais c'est à la course de còte du mont Agel qu'allait s'affirmer sa virtuosité légendaire et ses “réflexes”. Il courait pour la troisième fois cette épreuve et caressait le désir de battre le record de la montée déjà amélioré par lui l'année précédente. Il avait accompli une escalade impressionnante, terriblement rapide, lorsque, parvenu à la demière courbe où l'un des concurrents le précédant avait involontairement mis à mal le parapet du virage, sa voiture dérapa tout à coup sur le sable resté sur le sol et fit un téte-à-queue complet.
Que pensez-vous que fit Benoist ? Il prit sa décision en l'espace d'un éclair: la ligne d'arrivée était trop proche pour qu'il se remit en ligne et tentat un nouvel essai; il termina donc en marche arrière et passa sous la banderole, la pointe arrière en avant, devant les spectateurs enthousiasmés et les officiels éberlués.
Ce qu'il faut encore retenir de ce coup de “ marche arrière ”, c'est que son auteur battit une fois de plus le record du Mont Agel.
Une autre fois, au Grand Prix de 1'A.C.F. couru en 1906 (1) sur l'autodrome de Montlhéry, Robert Benoist venait de passer en trombe devant les tribunes et se préparait à aborder le circuit routier lorsque le capot de son bolide, mal assujetti, se détacha soudain, se souleva par la violence de l'air déplacé par la vitesse et passa au-dessus du pilote, presque au ras de l'auvent de la voiture lancée à 240 km heure. Durant cette dangereuse trajectoire, Benoist n’eut que le temps de baisser la tête pour n'étre point décapité à son volant.
Ce jour-là, il ftit encore sauvé par l'extréme promptitude de ses réflexes.
Grâce à sa voiture, Benoist échappe à deux reprises aux Allemands
Il est encore une anecdote qui démontre péremptoirement la force de caractère et le cran du champion. Elle remonte aux heures grises de l'exode, en 1940, et vaut d'être contée ainsi que je l'ai fait dans mon livre: Robert Benoist, champion du monde.
“En 1940, Robert Benoist était lieutenant de l'armée de l'air et il avait dû subir le repli de son unité avec les autres services du Bourget et de Villacoublay.
Le 14 juin, au petit jour, tandis que les pompiers de Paris se hâtent d’enlever de la façade de certains immeubles les quelques drapeaux tricolores restés accrochés aux fenêtres, l'ennemi pénètre dans la capitale, morne et silencieuse, par les portes de la Villette, de Clignancourt et de la Chapelle.
Il suivra les boulevards extérieurs jusqu'à la porte Maillot pour se scinder en deux tronçons, entièrement motorisés, l'un montant vers l'Etoile pour redescendre ensuite les Champs-Elysées absolument vides, vers la Concorde; l'autre prenant la direction de l'ouest par Neuilly, la Défense et Saint-Germain-en-Laye.
De justesse le lieutenant Benoist, qui est resté au Bourget jusqu'à l'extreme limite, a pu éviter l'aftligeante vision et prendre la route quelques heures auparavant dans sa rapide “Bugatti 57” personnelle, que pour rien au monde il n'aurait voulu voir tomber aux mains de l'ennemi dans son garage parisien.
Mais les routes sont de plus en plus encombrées par l'exode. Des véhicules de toutes sortes avancent péniblement, par trois ou quatre de front sur nos grandes parallèles, c'est un immense cortège de déroute et de misère qui se traine, à une allure d'escargot, vers le sud.
Benoist n'a d'autre ressource que de suivre la file, comme tout le monde, mais il se fera rattraper peu après Poitiers, par les éléments avancés d'une “Panzerdivision”. Dans sa voiture découverte, un lieutenant allemand a aperçu la Bugatti et, revolver en main, fait signe à son conducteur de stopper.
Robert Benoist est en tenue, c'est donc un militaire de plus fait prisonnier sur la route.
On lui ordonne de rester au volant de sa voiture et de s'intercaler immédiatement dans le cortège des blindés allemands.
Deux motocylistes et un side-car, dont le passager tient une mitraillette menaçante, sont chargés de veiller sur la Bugatti, nouvelle capture des Allemands, mais capture provisoire ...
On va voir pourquoi et comment :
Robert, qui a réalisé très rapidement la situation, la juge fàcheuse et assez critique, mais il estime qu'elle n'est pas tout à fait perdue.
D'ores et déjà, et tout en restant sagement dans la file des “vert-de-gris”, il mûrit son plan.
Au soir, les Allemands ralentissent leur avance et leur cortège s'installe pour la nuit dans une vaste prairie contigue à la grand'route.
Des sentinelles sont placées un peu partout et Robert Benoist reçoit l'ordre de ne pas bouger de sa voiture. Avec quelques autres officiers, l'Allemand est revenu en curieux voir la “57 S”” et, soulevant le capot, il leur donne quelques explications. Peut-étre était-ce un connaisseur ?
Toujours est-il qu'elle lui faisait envie, cette belle voiture française ! La nuit passe, peuplée de bruits de moteurs dans le ciel ou sur les routes.
Avant que ne pointe le jour, un sous-officier est venu et, usant d'une torche électrique, il contròle ce qui reste d'essence dans le réservoir. Robert Benoist, utilisant force gestes, lui fera comprendre la nécessité de faire le plein en vue de l'étape prochaine et des centaines de kilomètres à parcourir. L'Allemand ne fait aucune difficulté pour ramener plusieurs bidons et l’on remplit, à méme, la nourrice de secours.
Le pilote de la “ 57” ne demandait pas autre chose.
A l'aube, soucieux, sans doute, d'étre aux Pyrénées au plus vite, les Allemands reprenaient la route et c'est alors qu'aux premières heures de la matinée, profitant d'un court relàchement de sa surveillance par les motocyclistes occupés pour quelques instants ailleurs, Robert Benoist, au risque d'étre tiré à bout portant par l'arrière-garde des blindés, faussait brusquement compagnie à ses gardes motorisés en obliquant à gauche et en s'engageant “-pleins tubes” sur une petite route de traverse, absolument inconnue, mais qui devait bien mener quelque part. Jamais les Allemands ne rattrapèrent le cabriolet à compresseur dont le conducteur, champion du monde, venait de leur jouer un bon tour".
Robert Benoist, dont l'activité dans la Résistance est restée légendaire, fut capturé une autre fois par la Gestapo, en 1943, mais il parvint à s'enfuir de la traction avant noire à roues jaunes qui l’emmenait avenue Foch, en profitant d'un arrét brutal de la voiture pour fausser compagnie à ses gardiens, projetés non moins brutalement vers la banquette avant.
Un centième de seconde, Robert ouvre la portière, saute sur la chaussée et se perd dans la foule, assez dense à cet endroit-là: c'était le carrefour Richelieu-Drouot.
Là encore, ses réflexes l'avaient sauvé.
Ce sympathique champion a eu une fin douloureuse et tragique.
Lui qui avait tant de fois nargué la mort à bord de son avion de chasse, en 1914-18, ou de ses bolides de course, en 1921-1939, est tombé victime de son courage et de son patriotisme.
Les nazis le pendent
Son sacrifice valait bien qu'on exalte son souvenir. Echappé trois fois à la Gestapo, dans des circonstances plus dramatiques les unes que les autres, il fut capturé en juin 1944 et, cette fois, expédié d'office au camp de Buchenwald où il fut mis en cellule avec le matricule n° 13002. Ses trente-six compagnons de convoi, tous officiers français, anglais, belges et canadiens, subirent le méme sort.
Le champion au monde de l'automobile, Robert Benoist, fut exécuté par pendaison le 12 septembre 1944.
Il est mort comme on sait mourir chez nous, bravement, avec dignité et noblesse, son fier regard d'aigle tourné une dernière fois vers l' ouest où il avait tout laissé: sa patrie, son foyer, son bonheur, des amis très chers et tant de gIoire conquise à la force des poignets.
Il n'est pas, en dehors de son “ camarade d'écurie” de chez Bugatti, l'Anglais Williams, un coureur en automobile qui ait connu ce sort tragique des déportés assassinés.
NOTA
(1) Si tratta evidentemente di errore di stampa. Si dovrebbe leggere “1935” anziché “1906”.
Tratto da pag.82-83 di “Le monde et la vie – Premiers sur la route” hors sèrie Automobile N°2, di Roger Labric, anno 1960.
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eddiesachs il 03/03/2010, 12:01, modificato 1 volta in totale.